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SPECTRE OPTIQUE
2024
Le terme "spectre", signifiant "apparence immatérielle" ou "illusion", a longtemps été utilisé pour désigner les phénomènes optiques inexpliqués. Au XVIIe siècle, il était synonyme de couleur accidentelle et servait à désigner les impressions rétiniennes du contraste simultané ou successif, ainsi que les irisations observées au bord d’un objet regardé à travers un prisme.
Isaac Newton n'employa ce terme qu'une seule fois dans son article de 1671 sur l’optique, où il expliqua que la lumière blanche est "un mélange hétérogène de rayons différemment réfrangibles". Il démontra que les couleurs ne sont pas de simples modifications de la lumière, comme le pensaient Aristote et ses disciples, mais des propriétés originales associées à chaque rayon lumineux. Les moins réfrangibles apparaissent rouges, tandis que les plus réfrangibles sont d’un violet profond. Cette association de propriétés est inaltérable, et les transformations de couleurs n’apparaissent que lors du mélange des rayons.
Newton introduisit l'expression "couleurs prismatiques", réservant le terme "spectre" aux phénomènes douteux ou inexpliqués. Cependant, l’usage du terme "spectral" pour décrire ces couleurs persistait, alimenté par les opposants à la théorie physique de la lumière, notamment Goethe et Schopenhauer. Goethe développa une théorie alternative, fondée sur l’observation des couleurs perçues plutôt que sur une analyse physique de la lumière. Il voyait les couleurs comme un phénomène subjectif, influencé par la perception humaine et l’interaction entre la lumière et l’ombre.
Cette réflexion historique et scientifique trouve une résonance directe dans mes créations artistiques. Par exemple, l’une de mes œuvres numériques abstraites exploite des dégradés fluides et des transitions de couleurs qui rappellent les irisations observées à travers un prisme. Les teintes alternent entre des nuances froides, comme le bleu et le vert, et des tonalités chaudes, comme le rose et le doré, créant un contraste à la fois apaisant et intrigant. Encadrées par des bordures sombres, ces compositions évoquent un mouvement immatériel, vibrant, presque hypnotique.
Ces visuels sont souvent générés à l’aide d’algorithmes de bruit procédural, modélisant des flux organiques et des structures géométriques complexes. Une fois les images générées, elles sont exportées et enrichies par Stable Diffusion, un modèle d’intelligence artificielle qui ajoute des détails, affine les textures et interprète les formes selon des descriptions spécifiques.
Ainsi, grâce à cette synergie entre programmation, art génératif et intelligence artificielle. Mon travail est une exploration constante des potentialités de l'algorithme comme médium artistique, en dialogue avec des siècles de recherche sur la perception et la nature de la lumière.